Η αμφιβολική σκέψη στο θέατρο του Πιραντέλλο

Part of : Χρονικά αισθητικής : ετήσιον δελτίον της Ελληνικής Εταιρείας Αισθητικής ; Vol.ΣΤ-Ζ, 1967, pages 92-105

Issue:
Pages:
92-105
Parallel Title:
La pensée amphibolique dans le théâtre de Pirandello
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Abstract:
Rattacher le théâtre de Pirandello à une philosophie du doute et de l’ambiguïté est un de ces motifs qui s’imposent lorsqu’on prend la peine de parcourir les 9 volumes de la traduction française de ses oeuvres de théâtre. On y découvre alors une pensée qui se meut principalement dans un univers à double polarisation, et qui oscille toujours entre la réalité et le rêve, l’illusion et la vérité, la folie et la simulation, le possible et l’existant, le subjectif et l’objectif, où toutes sortes de choix ont lieu qui expriment les conflits les plus troublants qui se concrétisent à l’intérieur de chacun de ses personnages: conflit entre la réalité atroce et le besoin de vivre dans l’illusion dans «Henri IV», conflit entre le personnage conventionnel que la société demande et l’homme authentique et vivant dans «Quand on est quelqu’un», conflit entre la femme et l’actrice dans «Se trouver», conflit entre le premier mari qui incarne la poésie et le risque et le second qui incarne la sécurité dans «Eve et Line», conflit entre le vieil artiste qui brise ses statues et le jeune qui ne désire créer qu’une statue unique dans «Diane et Tunda» etc. On pourrait, certes, associer ces conflits existentiels à des problèmes envisagés par la pensée philosophique, comme par exemple celui de l’isolement des monades de Leibniz, celui de la non existence du monde extérieur de Berkeley, y chercher même une application du mythe de l’allégorie de la caverne de Platon ou encore le jeu de l’homme avec le non être ou le hasard de l’«Igitur» Mallarméen ou du «Coup de dés», aller jusqu’à découvrir les motifs principaux de la dialectique de l’être et du néant d’un Sartre ou du sens et du non sens d’un Merleau - Ponty, si les ouvrages de ces deux philosophes n’étaient pas postérieurs à l’oeuvre de Pirandello. Mais tous ces rapprochements, faits après coup, ne sauraient démontrer par eux-mêmes que Pirandello ait voulu illustrer par son théâtre des motifs puisés dans l’étude des systèmes philosophiques abstraits, s’il n’y avait pas dans «La volupté de l’honneur» une référence directe au texte des «Méditations» de Descartes. Ainsi, il met dans la bouche d’un de ses héros les paroles suivantes: «Maurice — ... Il me semblait n’être plus sur terre, mais dans un pays de songe, étrange, lugubre, mystérieux, où il se mouvait en maître, où les choses les plus bizzares, les plus invraisemblables pouvaient arriver et devenir normales et familières. Il s’en aperçut — il s’aperçoit de tout, — sourit et me parla de Descartes. Fabio — De qui? Maurice — De Descartes, le philosophe. Ah! parce qu’il est aussi, tu verras, d’une culture philosophique formidable. Il me dit que Descartes... Fabio — Mais, au nom du ciel, que veux-tu que m’importe Descartes en ce moment? Maurice — Laisse-moi dire! Tu verras que cela t’intéresse! Il me dit que Descartes, étudiant notre conscience de la réalité, eut une des plus terribles pensées qui se soient jamais présentées à l’esprit humain, celle-ci: que si les songes avaient de la régularité, nous ne pourrions plus distinguer le sommeil de l’état de veille. N’as-tu jamais éprouvé une sensation étrange quand un de tes songes se répétait plusieurs fois? Troublante! Il devient presque impossible de ne pas croire qu’on se trouve devant une réalité. Parce qu’en somme toute notre connaissance du monde est suspendue à ce fil archisubtil: la ré-gu-la-ri-té de nos expériences».Cette référence précise à Descartes montre que Pirandello était pleinement conscient de la signification philosophique des problèmes qu’il posait à travers ses héros. Cela cependant ne l’a nullement empêché de rendre ses personnages de vrais personnages de théâtre et non pas des êtres abstraits destinés à illustrer des thèses philosophiques. Certes, le problème de la pensée amphibolique ne constitue pas, malgré la diversité des formes qu’il revêt chez lui, le seul problème que Pirandello pose par son oeuvre, car on pourrait projeter sur cette oeuvre toutes sortes d’autres éclairages; mais, des situations comme celles que nous venons de relever, sont tellement nombreuses, qu’on aurait le droit de soutenir que le problème du doute constitue le centre de gravité de son oeuvre théâtrale.
Subject:
Subject (LC):
Keywords:
δραματουργία